Le vétérinaire délégué de la Fédération Équestre Internationale (FEI), Dr. Thierry Grisard nous partage sa passion pour ce métier à la fois exigeant et poignant.
Pourquoi êtes-vous devenu vétérinaire et qu’est-ce qui vous passionne dans ce métier ?
Je suis devenu vétérinaire par passion pour les chevaux car j’étais cavalier auparavant. Ce qui me passionne aujourd’hui ce sont les pathologies de l’appareil locomoteur.
Pourquoi avoir choisi la spécialité des chevaux ?
J’ai choisi cette spécialité car j’étais moi-même cavalier. C’était ma première motivation. Ça me permet aussi de vivre dehors au plein air car je ne suis pas fait pour rester enfermé à l’intérieur. Ce métier me permet d’allier mon activité professionnelle à ma passion pour les chevaux. D’autant plus que j’ai davantage de facilité à communiquer avec les chevaux qu’avec les humains.
Le milieu vétérinaire, est-il un milieu facile ?
Tout dépend. C’est effectivement un métier exigeant. Tout d’abord, physiquement car on a des patients
qui font entre 400 et 700 kg. Les chevaux sont des animaux qui peuvent être dangereux dépendant de la situation dans laquelle on se met. Il y a aussi la fatigue morale car nous faisons beaucoup d’heures et nous subissons beaucoup de pression car nous pouvons faire face à des chevaux de haut niveau où les erreurs et les aléas peuvent vite nous amener à prendre des décisions difficiles. On ne choisit pas forcement de vivre cela quand on choisit ce métier mais j’ai la chance d’exercer dans un groupe, cela nous permet de nous soutenir les uns les autres dans toutes les situations.
En quoi consiste le rôle d’un vétérinaire lors d’un concours hippique ?
Il y a deux rôles différents qui ne sont pas réalisables conjointement : soit on est vétérinaire délégué et on représente la FEI soit on est vétérinaire traitant/de terrain et, à ce moment-là, on est là pour faire les soins aux chevaux, faire les traitements et gérer les urgences. Les deux sont approuvés par la FEI. Nous avons un certain devoir de communication vis-à- vis du jury et du cavalier/ entraîneur/propriétaire par rapport aux sanctions ou décisions qui vont être prises.
Que vérifiez-vous avant un concours pour valider la participation d’un cheval ?
On fait un examen pour s’assurer que les chevaux sont en état de concourir. C’est l’examen pré-compétition dans lequel on vérifie que c’est le bon cheval (avec les papiers et passeports), qu’il est en règle sanitaire et qu’il est apte à concourir.
Vous est-il déjà arrivé de refuser la participation d’un cheval et pourquoi ?
Oui. Statistiquement, il y a à peu près entre 0,5 % et 1 % des chevaux qui sont retirés. Dans les grandes épreuves, finales et championnats, il y a même une réinspection avant la dernière manche.
Travaillez-vous en équipe, en binôme ou seul ?
Je travaille en équipe en temps normal. J’ai 6 associés et nous sommes en tout 9 vétérinaires dans notre clinique qui soigne exclusivement des chevaux. En ce qui concerne tous les concours classiques, le vétérinaire délégué est seul. Pour les grandes épreuves, il y a une commission vétérinaire où nous sommes 3 dont, au minimum, un étranger. Il est important de pouvoir donner un avis collégial pour justifier nos décisions.
Quels types de soins faut-il faire régulièrement à ses chevaux pour les garder en bonne santé ?
Il faut tout d’abord faire des vaccins tous les 6 mois pour les chevaux participant aux épreuves FEI et la fréquence des vermifuges dépend du mode d’habitat (4 fois par an). Tous les cas sont différents mais en fonction de l’intensité de l’activité et du niveau sportif, nous conseillons de faire un contrôle général minimum 2 fois par an sur le plan orthopédique et 1 à 2 fois par mois pour les chevaux de haut niveau. La tendance est que la médicalisation devienne moins intense que la prévention.
Avez-vous des conseils à donner à un jeune cavalier ?
La première chose est de bien s’entourer et de prendre des conseils à la fois sur la gestion du quotidien
du cheval (hébergement, nourriture, stratégie d’entrainement) et d’avoir un plan et d’être très à l’écoute de son cheval. Il faut être éthique: le sport, c’est bien, mais il faut être un homme de cheval avant d’être un sportif de haut niveau.
Quelle a été votre plus belle expérience ?
J’ai eu la chance de participer à l’organisation des finales de coupes du monde à Paris, d’autant plus que le projet a été une réelle réussite.
Quel est votre pire souvenir ?
Le pire souvenir comme soignant c’est d’avoir dû évacuer un cheval atteint d’une forme
nerveuse d’Herpes virus sur un concours et qui malheureusement a dû être euthanasié. Ma pire expérience en tant que vétérinaire officiel est d’avoir dû éliminer le cheval de Patrice Delaveau (cavalier français) alors qu’il était en position de gagner. C’est toujours difficile de devoir éliminer quelqu’un en position de gagner et, en plus, lorsqu’il est de la même nation.